Le Facteur

A la Folie Théâtre (Paris 11e) l'on peut redécouvrir Le Facteur, écrit et mis en scène par Etienne Fraday. C'est un spectacle percutant, à la fois drôle et mélancolique ayant pour toile de fond l'Occupation et ses secrets inavouables.
D'emblée, Le facteur nous oriente théâtralement vers le climat indécis et provincial des périodes historiques improbables. Celle de l'Occupation y est toute fraîche avec son lot de personnages troubles,  de négoces obscurs et de petits marivaudages. Etienne Fraday  vient du Périgord, grand département de la résistance.  Il décrit ainsi la genèse de son spectacle Le Facteur :  « Ce projet est né des’histoires' que me racontait ma grand-mère.  J’ai toujours baigné dans les vielles histoires de guerre que les anciens nous transmettaient. C’est pour cela qu’il me tenait à coeur d’écrire cette pièce, une sorte d’hommage à ma grand-mère et à toutes les personnes ayant connu les heures tristes de l’histoire. »   

Le Facteur

L'histoire se passe le 22 janvier 1946.  Le Général de Gaulle vient d’annoncer sa démission au gouvernement provisoire. Dans la maison d’un petit village de Dordogne, lors d’un soir de tempête, deux jeunes femmes, Marie-Clothilde et Lucienne, sont en train d’attendre avec nervosité la venue du père Christian, le Curé du Village. Lors de son arrivée dans la maison appartenant à Marie-Clothilde, il découvre le pétrin dans lequel il met les pieds. En effet, les deux femmes lui avouent qu’elles ont accidentellement tué le Facteur du Canton. Pris par la confession chrétienne, le Curé se retrouve complice de ce meurtre. 

Le Facteur 

Rythmée et  originale la mise en scène de  Etienne Fraday nous fait rentrer dans une histoire pleine de  surprises, qui rappelle à la fois la série noire et  le cinéma populaire  d'avant-guerre.    Doués et instinctifs, les comédiens de la compagnie Dryadalis se glissent naturellement dans une série de rebondissements et de scènes cocasses. L'arrivée dans la maison d'Hélène (la soeur de Marie-Clothilde) et de son compagnon Georges (dont l'on ne dévoilera pas la profession !) oriente Le Facteur vers un registre de vaudeville policier.  Quant aux mimiques de  Etienne Fraday (dans le rôle du père Christian), elles ne sont  pas sans rappeler parfois l'irrésistible Don Camillo, popularisé au cinéma par Fernandel.

Le Facteur 

A la fois touchants et drôles les personnages ont une certaine profondeur et  proposent  un regard perçant sur des thèmes comme la solitude féminine ou  la mésentente familiale. L'on retrouve aussi des thèmes toujours  d'actualité  comme le déni,  la subjectivité de l'Histoire ou le fait de  cacher  son orientation sexuelle en milieu rural.  Au fil de la progression narrative  le spectateur est amené à mieux cerner  le rôle de la Seconde Guerre mondiale et plus particulièrement de l'Occupation  dans l'exacerbation des  maux dont souffrent les personnages.  

Le Facteur 

Le Facteur   nous invite aussi à un jugement plus nuancé sur la part d’ombre de chacun d'entre eux. Ainsi, la pièce propose une relecture de leurs actes, nous invitant à mieux cerner les personnages,  ce qui donne à la pièce, outre son parfum régionaliste un aspect subtilement documentaire, voire chrétien. Oscillant constamment entre moments mélodramatiques et comédie grand guignol  Le Facteur se profile  une tragi-comédie désopilante, à la fois cruelle et tendre, finalement  pleine d'espoirs en le genre humain!

durée : 1 h 30

Reprise

Le Facteur, une pièce écrite et mise en scène par Etienne Fraday

Compagnie Dryadalis
Avec Laurie Calhiol, Margot Planque, Rachel Dauchy, Hugo Tchekemian, Etienne Fraday

A La Folie Théâtre (salle Grande Folie)
6, rue de la Folie Méricourt
Paris 11e
horaires : du mercredi au samedi à 19 h 30

jusqu'au 20 juillet   2024