Dans La comédie urbaine selon Antonio Segui, récit mêlant fiction et histoire, Christine Frérot fait entrecroiser le personnage fétiche du peintre, Don Gustavo, avec la vie et la carrière artistique de l'Argentin Antonio Segui (1934-2022). Docteur en histoire de l'art et spécialiste du Mexique, l'autrice nous propose un savoureux voyage dans l'univers de cette véritable star en Amérique du Sud depuis la fin des années 1950, dont le travail fut révélé en Europe à l’occasion de la IIIe Biennale de Paris, en 1963. A partir d'une peinture emblématique intitulée « Despertar de una ciudad » (Réveil d'une ville) de 2002 (acquise par le Musée national d'art moderne, Centre Georges Pompidou), elle nous brosse un portrait vivant de l'homme et de son oeuvre marquée par une étrangeté grinçante et un certain humour. Il ya chez Segui la marque d'un fort climat social satirique. A propos de cette création atypique Christine Frérot écrit : « Cette peinture exprime l'inclination de Segui à représenter des groupes, des foules où, pourtant, chaque individu se détache et trouve sa place dans un ensemble qui peut sembler répétitif, mais où chacun est différent. Car pour lui, l'homme, dans notre société grégaire, n'est pas capable d'affronter seul le monde. » (page 19). Señor Gustavo, son personnage emblématique dans ses tableaux, est vêtu d'un costume et d'un chapeau. Il parcourt les rues, la planète, et se pose comme Tintin des questions sur la vie. L'univers sarcastique d'Antonio Segui est inspiré de la bande dessinée, et il intègre parfois des bulles de dialogue dans ses œuvres contemporaines, donnant l'impression que ses personnages sont en train de converser. Sur de multiples supports, de la peinture à la photographie, de la lithographie à la sculpture monumentale, l'artiste aura donné vie à toute une galerie de personnages en mouvement, absorbés par le rythme effréné des villes. Antonio Seguí nourrissait aussi une grande admiration pour les créations artistiques des peintres George Grosz et Otto Dix, dont le style et l'approche artistique l'ont influencé. La comédie urbaine selon Antonio Segui nous raconte sur un ton plaisant et vulgarisateur toutes ces influences diverses qui ont forgé cet artiste rare ayant choisi de traiter dans sa peinture des thèmes existentiels sur le mode de l'humour et de la distanciation. Comme l'écrit finement Christine Frérot :
« Le théâtre urbain de Segui n'est autre qu'une comédie humaine vue par l'oeil d'un entomologiste visionnaire, déclinant l'absurdité du monde en la conjuguant au principe d'espérance » (page 96)
Christine Frérot, La comédie urbaine selon Antonio Segui, broché, éditions Ateliers Henry Dougier, collection Le roman d'un chef-d'oeuvre, 116 pages, 2024
A signaler :
Présentation du livre
Jeudi 20 juin à 18 h 30 à la médiathèque d'Accueil (ville où Segui vivait et travaillait)
1, rue Louis Frébault, Arcueil (94)
Lundi 23 septembre à la Maison de l'Amérique Latine
217, boulevard Saint-Germain, Paris 17e
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