John Singer Sargent

Dans un livre simplement intitulé John Singer Sargent, l'historienne d'art Sandrine Andrews retrace l'ascension fulgurante d'un artiste exceptionnel. Peintre, dessinateur et aquarelliste, John Singer Sargent (1856-1925) fut surtout connu pour ses portraits mondains de la Belle Epoque. Richement illustré, ce livre au texte concis nous fait découvrir une oeuvre à multiples facettes !  Fils de parents américains, il a grandi et été formé en Europe et c'est à Paris qu'il a connu ses premiers succès. Ses portraits et ses paysages, techniquement brillants, dégagent une vivacité qui tranche nettement avec la peinture académique de salon du XIXee siècle.  Autrice d'un intéressant  ouvrage sur Gustave Caillebotte, autre maître remarquable du XIXe siècle,  Sandrine Andrews nous propose une fine synthèse de tout ce qui fait  l'attrait pictural de cet artiste, très connu de son vivant, oublié au XXe siècle puis redécouvert ces dernières décennies. 

La couleur et le mouvement jouent un rôle décisif dans ses œuvres – très proches de l’impressionnisme. Et peut-être la perception première que procure ses tableaux oriente le visiteur vers un mix de poésie et de modernité comme dans sa façon de capter le mouvement même de l'élan musical dans le bigarré tableau Répétition de l'Orchestre Pasdeloup au Cirque d'Hiver (1879-1880) ou dans sa manière de croquer ses personnages dans des paysages crépusculaires, pouvant rappeler ceux de Boudin ou de Sorolla comme dans l'indéterminée toile En route pour la pêche (1878).  S’il aime peindre des paysages, Sargent excelle aussi dans le portrait.  Dès les années 1890 il est considéré comme un des maîtres du genre et  Andrews apporte cette précision dans son livre : « Entre 1891 et 1893, Sargent peint près de 150 tableaux représentant une clientèle très variée d'acteurs et d'artistes aussi bien que d'hommes d'affaires et leur famille ; il devient le peintre le plus recherché de son époque. »

Bien plus qu'un portraitiste à la mode, le peintre sait insuffler un réel mystère dans ses tableaux. Il a un don discret de metteur en scène, comme Degas, Sickert ou Caillebotte. Ce qui n'est guère étonnant pour un artiste qui admire entre autres Goya, le Greco, Vélasquez, Van Eyck ou Gainsborough. Par exemple dans ses Portraits d'enfances sa toile immense intitulée Les Filles  d'Edward Darley Boit (1882) n'est pas sans rappeler le climat entre chien et loup  des Ménimes de Vélasquez. Dans un autre style, son tableau de fillettes se fondant dans la nature [Carnation, Lily, Lily, Rose] entre lanternes et fleurs n'est pas sans nous orienter vers l'esthétisme raffiné des préraphaélites.    Sargent voyage beaucoup (Europe, Etats-Unis, Syrie, Palestine). Comme l'écrit  l'autrice : « Loin des commandes de portraits  ou de ses peintures murales, il se sent plus libre  et rassemble  des images resplendissantes de paysages, d'architectures, de plantes exotiques et même d'animaux... »

Par le jeu original des couleurs ou des motifs chaque oeuvre intrigue par sa science magique du détail. Sargent multiplie les climats et les sujets  que ce soit une danseuse de music-hall (La Carmencita, 1890) un célèbre écrivain   dans son intimité (Robert Louis Stevenson et sa femme, 1885),   un président américain (Theodore Roosevelt, 1903) ou de simples Bédouins dans le désert (Bédouins,1905-1906).   Sargent mourut dans son sommeil le 14 avril 1925 à Londres. Il laissa derrière lui une collection d’environ 2 000 aquarelles, plus de 900 toiles et un nombre incalculable de dessins. Peintre énigmatique, l'artiste n'est  pas  facile à classer.  Interrogeant sa place dans l'histoire de l'art Sandrine Andrews écrit : « John Singer Sargent est-il un naturaliste, un impressionniste ou n'entre-t-il tout simplement dans aucune catégorie ?  » 

Sandrine Andrews, John Singer Sargent, relié, grand format, Histoire de l'art, éditions Larousse, 128 pages, 2025

A signaler : Exposition au musée d'Orsay
Sargent : Les années parisiennes (1874-1884), du 22 septembre 2025 au 11 janvier 2026

A lire :

Sandrine Andrews, Gustave Caillebotte, relié, grand format, Art/Beau-Livre, éditions Larousse, 128 pages, 2024

http://blogdephaco.blogspot.com/2024/09/gustave-caillebotte.html

Pamela Corvalan, Louis de Meuron 1868-1949 : retour à l'impressionnisme, Beau Livre/Art, éditions Château & Attinger, 224 pages, 2023

http://blogdephaco.blogspot.com/2024/04/louis-de-meuron-1868-1949-retour.html#more

Albert Baertsoen - Protagoniste fin de siècle, ouvrage collectif, relié, éditions Snoeck, 300 pages, 2022
Auteurs : Johan De Smet, Stefan Huygebaert, René Vermeir, Yann Farinaux-Le Sidaner, Stephen Goddard

http://blogdephaco.blogspot.com/2022/10/albert-baertsoen-protagoniste-fin-de.html#more

Eva Bester, Léon Spilliaert, essai, éditions Autrement, couleur - broché, 112 pages, 2020  

http://blogdephaco.blogspot.com/2020/12/leon-spilliaert.html#more

Collectif, Henry de Groux (1866-1930) maître de la démesure, coédition musée Félicien-Rops, Namur / In Fine éditions d’art, 176 pages, 120 illustrations, reliure cartonnée contrecollée, format 24 x 28 cm, français, 2019

http://blogdephaco.blogspot.com/2019/07/henry-de-groux-1866-1930-maitre-de-la.html#more

Delphine Lévy, Walter Sickert (1860-1942), l’art de l’énigme, éditions Somogy, 152 pages / 80 illustrations, 2016 

http://blogdephaco.blogspot.com/2016/06/walter-sickert-1860-1942-lart-de-lenigme.html#more

Laure Dominique Agniel, Gauguin aux Marquises - L’homme qui rêvait d’une île, éditions Tallandier, 224 pages, 2016 

http://blogdephaco.blogspot.com/2016/03/gauguin-aux-marquises-lhomme-qui-revait.html#more

Jacques-Emile Blanche, portraitiste de la Belle Epoque, ouvrage collectif, éditions des Falaises, 96 pages, 44 reproductions d’œuvres, 2016

http://blogdephaco.blogspot.com/2016/05/jacques-emile-blanche-portraitiste-de.html#more

Catalogue Albert Besnard (1849-1934) Modernités Belle Epoque, ouvrage collectif, Palais Lumière Ville d’Evian / Somogy, 300 pages, 2016

http://blogdephaco.blogspot.com/2016/08/albert-besnard-1849-1934-modernites.html#more 

Klaus H. Carl, Le Douanier Rousseau, éditions Eyrolles, 192 pages, 2016 

http://blogdephaco.blogspot.com/2016/05/le-douanier-rousseau.html#more