Artiste indépendant majeur de l'art figuratif de l'entre deux-guerres, le peintre et graveur Robert Lotiron (1886-1966) était tombé dans l'oubli. Un ouvrage ambitieux rend hommage à son oeuvre exceptionnelle. Né à Paris, Robert Lotiron voit sa vocation de peintre se dessiner très jeune suite à la découverte de la collection de tableaux impressionnistes du Docteur Viau, dentiste de la famille. Son père le destinant à la reprise de son négoce de dentelles, il effectue, sans engouement, des études en Angleterre de 1901 à 1903.
Cependant, dès son retour à Paris, il s’inscrit à l’Académie Julian où il fréquente l’atelier de Jules Lefèbvre et se lie d’amitié avec Roger de La Fresnaye (1885-1925) et Louis Marcousis (1878-1941). Figure de l'avant-garde, il est invité en 1912 aux côtés de Picasso et de Derain à la deuxième exposition munichoise du Blaue Reiter et connait le succès en 1913 avec sa toile Le Tennis. D’abord influencé par l’impressionnisme, il adhéra brièvement au cubisme, qui marque sa maturité avec l’expression d’une forte synthèse des formes.
S’imposant ensuite comme l’un des paysagistes les plus en vue de son époque, ses œuvres sont régulièrement acquises par l’Etat français, bénéficiant, dans les années 30, de plusieurs commandes de décorations murales. Calme et expressive, la peinture de Lotiron dégage une certaine nostalgie et enveloppe d'un charme un peu provincial à travers des thèmes intimistes comme les ports, les beaux dimanches, Paris et sa banlieue, le travail aux champs, les guinguettes ou encore les vues de Seine.
L'artiste excelle notamment dans des représentations de personnages tranquilles en réunion comme dans Le Jacquet (1920) ou Le Violoncelliste (1929). L'ouvrage collectif qui lui est consacré nous fait découvrir une peinture discrète et poétique, certes un peu austère mais captive, notamment par la couleur qui rythme ses toiles, fait songer un peu à Cézanne et lui donne de la profondeur.
L'on y découvre aussi un peintre au style affirmé, d'inspiration néoréaliste. Ayant abordé la lithographie, après la seconde guerre mondiale, sa vision se fera de plus en plus directe et dépouillée. Au final, ce livre nous dresse un témoignage vivace du parcours d'un artiste confidentiel, à la fois peintre et graveur, au firmament du raffinement de la couleur et aux créations délicates et inspirées !
La poésie du quotidien - Robert Lotiron (1886-1966), ouvrage collectif, grand format, éditions Gourcuff Gradenigo, 191 pages, 2022
Auteurs : Bruno Gaudichon, Alice Cornier, Patrick Descamps
Robert Lotiron, Le Tennis, 1913
Huile sur toile
Collection privée
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