Réalisé par Julie Navarro dont c'est le premier long métrage Quelques jours pas plus est un film incisif et drôle posant avec acuité le problème de la réception des migrants. Il est adapté du roman De l'influence du lancer de minibar sur rengagement humanitaire* de Marc Salbert. Dans le rôle d'un ex journaliste de rock (Arthur Berthier) reconverti aux informations générales, Benjamin Biolay s'inscrit avec beaucoup de naturel dans cette comédie à la fois légère et dramatique, qui a comme toile de fond l'accueil des migrants et le travail bénévole des associations humanitaires.
Quelques jours pas plus
Pour interpréter Daoud Julie Navarro a choisi un vrai réfugié afghan (Amrulah Sofi). Au-delà de son questionnement sociétal et de sa fonction de lanceur d'alerte Quelques jours pas plus dégage une forte touche intimiste et capte subtilement l'air du temps, imprégné à la fois par le politique et ses messages, nombreux et contradictoires. Sur un mode réaliste et très vivant le film nous plonge dans le quotidien d'une petite association d'entraide bénévole dans un quartier populaire de Paris (la Goutte-d'Or). A la fois force communautaire et lieu d'opposition, l'association, mêlant jeunes engagés et paisibles retraités, nous est décrite à la fois dans ses combats humanitaires et dans ses moments conviviaux.
Quelques jours pas plus
Heureusement, le film a l'intelligence de gommer l'aspect didactique que peut revêtir parfois le combat des idées pour s'attacher à travers de vrais personnages à susciter une réflexion plus nuancée, ici sur l'immigration et la pauvreté. Le duo Biolay-Sofi se profile crédible. Le personnage d'Arthur Berthier n'étant pas obligatoirement « un bobo parisien installé dans du confort » ; le second n'étant pas automatiquement « le bon nègre Banania de service ». Avec gravité et humour Julie Navarro nous raconte cette histoire de rencontre improbable sous les traits à la fois d'une comédie sociale et du réalisme intimiste, nous proposant au passage d'amusants clins d'oeil sur la presse écrite et l'univers médiatique. Biolay y campe un amusant journaliste un peu fanfaron, ayant acquis une certaine gloriole après s'être fait frapper par un CRS.
Si dans le scénario l'hébergement provisoire de Daoud par Arthur Berthier n'est pas totalement désinteressé à l'origine il n'en est pas moins décrit comme une rencontre intéressante et fructueuse. Même limités, les échanges entre le timide Daoud (qui parle mal le français) et le décontracté Arthur Berthier nous sont peints avec un souci d'observation rappelant parfois le meilleur du cinéma documentaire. Et à travers certaines scènes de la vie quotidienne la réalisatrice semble nous suggérer que même dans des situations improbables la culture se profile le meilleur outil de communication comme lorsque Daoud fait connaître à son hôte ses recettes de plats afghans ou quand Arthur Berthier fait connaître à Daoud ses disques de The Kinks et de Led Zeppelin.
Quant à Camille Cottin, elle interprète Mathilde, autre personnage important du film caractérisé par sa ténacité et une certaine rudesse. Dans un amusant jeu entre chat et souris la cinéaste fait s'entrecroiser la nonchalance aristocratique du personnage d'Arthur Berthier avec l'énergie débordante de Mathilde dans son combat sans fin pour aider les réfugiés. Au final l'on recommandera ce film qui avec humour - et sans éluder aucunement le fond - questionne la crise migratoire, toujours de pleine actualité !
Quelques jours pas plus, un film de Julie Navarro, comédie dramatique, France, 2024
Avec Camille Cottin (Mathilde), Benjamin Biolay (Marc Salbert), Amrulah Sofi (Daoud)
* Marc Salbert, Quelques jours pas plus, roman, éditions le dilletante, 288 pages, 2015
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