lundi 9 novembre 2020

Valadon et ses contemporaines - peintres et sculptrices 1880 -1940


 Ouvrage richement illustré et assorti de contributions de spécialistes le catalogue Valadon et ses contemporaines - peintres et sculptrices 1880-1940 interroge le positionnement artistique particulier des artistes féminins à l'époque de toutes les avant-gardes. Un des intérêts majeurs de ce livre - publié à l'occasion de l'expo  prévue en novembre au Musée des Beaux-Arts de Limoges et reportée pour cause de reconfinement - est sans doute de faire redécouvrir ou mettre en valeur les nombreuses oubliées de l'histoire de l'art, de la fin du XIXe siècle à la veille de la Seconde Guerre mondiale. 

Suzanne Valadon, 1865 - 1938
La Terrasse du château de Saint-Bernard, 1927
Huile sur toile, 81 x 60 cm
Collection Maryse et Max Maréchal

Logiquement, le catalogue consacre une large part à la peintre Suzanne Valadon, dont la vie et le parcours artistique ont contribué à remuer les codes rigides de son époque. Pour accéder au statut d'artiste et évoluer dans le milieu  bon nombre de ces femmes ont dû lutter contre la méfiance et l'hostilité de leurs congénères masculins. Ainsi, dès la fin du XIXe siècle des artistes comme Hélène Bertaux, Virginie Demont-Breton ou George Achille-Fould font l'objet de moqueries et d'insultes.

Suzanne Valadon, 1865 - 1938
Portrait d'Erik Satie, 1892 - 1893
Huile sur toile, 41 x 22 cm
Paris, Centre Pompidou (legs du  docteur Robert Le Masle, 1974)

Simplement parce qu'elles s'écartent de sujets picturaux traditionnellement dévolus à leur sexe comme les broderies, les bouquets de fleurs ou autres sujets sentimentaux. Dans le chapitre En quête d'émancipation - Les femmes artistes à Paris autour de 1900 Charlotte Foucher Zarmanian souligne ainsi la lente évolution de l'entrée des femmes dans le champ des arts visuels : En France, l'Ecole des beaux-arts ouvre ses portes aux femmes en 1897, grâce aux pressions  du collectif de l'Union des femmes peintres et sculpteurs porté par la sculptrice Hélène Bertaux (1825-1929). 

Emilie Charmy, 1878 - 1974
Colette nue, 1919 - 1921
Huile sur toile, 89 x 147 cm
Collection Bouche

Avant ce changement de règlement, les femmes doivent se tourner vers des académies privées ou des ateliers spécifiques qui jouent un rôle crucial dans leur conquête à la formation artistique (page 20). A travers leurs thèmes et leur technique ces femmes n'hésitent pas à choisir des chemins aventureux et avant-gardistes comme par exemple celui de Valadon, qui met les corps et le nu au centre de sa création. Sur un mode à la fois clair et analytique dépassant la simple évocation textuelle de parcours féminins brillants et méconnus l'ouvrage Valadon et ses contemporaines nous rappelle toute la diversité de leur travail et surtout l'esprit de modernité, qui imprègne l'inspiration de ces artistes.

Louise Breslau, 1856-1977
Autoportrait, 1891
Huile sur panneau d'acajou, 45 x 39 cm
Strasbourg, musée d'Art moderne et contemporain

On redécouvre ainsi Emilie Charmy (1878-1974), une artiste dont un historien d'art notait qu'elle semble toujours précéder un peu les grands courants comme les Fauves en 1900 ou les cubistes cézaniens. (Pour peindre ses ses nus féminins elle choisissait souvent des prostituées). Dans un autre style mentionnons Chana Orloff (1888-1968) sculptrice majeure du XXe siècle représentant la femme de façon très stylisée. Celle-ci peut être nue, vêtue, biblique, maternelle ou au travail. Quant à Valentine Hugo (1887-1968) elle est renommée pour s'exprimer avec aisance à travers la peinture, la gravure sur bois ou sur cuir mais aussi à travers les décors de théâtre.

Marie Vassilieff, Le Deuxième bal de l'Aide Amicale aux Artistes, 1924
lithographie, Paris, collection particulière

Elle fut aussi photographe et l'épouse de l'arrière petit-fils du célèbre auteur de Notre-Dame de Paris. Qui se souvient de Marcelle Cahn (1895-1981) ? A son époque elle fut connue pour son cubisme épuré, orienté vers l'abstraction (Elle participa en 1930 à l’exposition du groupe Cercle et Carré, avec Piet Mondrian, Hans Arp, Torrès-Garcia et Kandinsky.) L'on signalera à la fin du catalogue une biographie détaillée de chacune de ces artistes, de Louise Abbéma (1853-1927) , incarnation type d'un certain modèle de femme artiste rebelle et émancipée à Gerda Wegener (1885-1940),  connue pour ses portraits de femmes et ses dessins de vitraux et mosaïques.  

Alice Bailly, Je d'éventail, 1913, huile sur toile, 93 x 73 cm
 Lausanne, Musée cantonal des Beaux-Arts

Valadon et ses contemporaines - peintres et sculptrices 1880 -1940, sous la direction d'Anne Liénard et de Magali Briat-Philippe, avec la participation de Charlotte Foucher-Zarmanian, Marianne Le Morvan, Lena Pfeiffer et Nathalie Ernoult.
Editions in fine, 208 pages/230 illustrations 25 x 28 cm, brochée avec grands rabats, version française, 2020

Jeanne Rij-Rousseau, Nature morte au kilo de sucre, vers 1915, 
 huile sur toile 65 x 8O,5 cm
Paris, Centre Pompidou

















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