Adaptée et mise en scène librement par
Alexis Armengol,
Platonov mais se profile d’emblée comme une belle mécanique théâtrale. C’est une pièce méconnue de
Tchekhov écrite à son adolescence. Elle préfigure les thèmes existentiels variés qui ont fait la réputation de l’écrivain russe.
Alexis Armengol s’est imprégné de cette œuvre, choisissant la traduction d’
André Markowicz et
Françoise Morvan. Avec finesse, tout en évitant malicieusement les formes narratives traditionnelles, il nous propose ce
Platonov mais, agréable apéritif tchékhovien, servi sous la forme d’un théâtre-concert.
Dialogues tumultueux, chant et musique (piano et guitare) viennent se frotter à l’attention du spectateur durant deux courtes heures.
Platonov mais débute par des retrouvailles entre amis lors d’un week-end.
Platonov, personnage central mais indéterminé, nous y apparaît sous des traits sarcastiques, tantôt enfantins, tantôt emplis de gravité. La pièce nous suggère son ascendant moral sur le petit groupe, constitué de
Sergueï (fils du général
Voïnitsev, mari de
Sofia),
Nikolaï (frère de
Sacha, fiancé de
Grékova),
Anna (jeune veuve),
Sofia (épouse de
Sergueï) et
Sacha (épouse de
Platonov), et plus particulièrement la fascination – parfois répulsive – qu’il exerce sur les trois derniers personnages.
photo © Marie Pétry - Platonov
La grande réussite du spectacle tient peut-être à cette ingénuité de la Parole élevée au rang burlesque. Dans Platonov mais, qui tient à la fois du vaudeville, de la comédie et du ressort tragique, l’on ne trouvera ni masques ni effets appuyés. Dans un décor plutôt bobo à la fois sobre et élégant, aux lumières tamisées, la parole survole, à la fois comique et diaboliquement suggestive. Vagissante ou sautillante, prête à sourire ou à mordre, distillant l’exquis venin du désir ou répandant le non moins violent poison de la condition sociale incertaine (celles de Platonov et de Sergueï), elle crée « le climat » de la pièce. Nous suivons donc cette Parole, qui se promène entre intermède pianistique et riffs de guitare tout au long d’un été interminable, offrant à ce Platonov cette rythmologie si savoureuse. Platonov mais, c’est un peu le mix d’un sketch de Groucho Marx et des Caractères de La Bruyère (en VO russe !). En tout cas, le savoir-faire des comédiens et le culot de la mise en scène offrent un effet théâtral des plus bluffants !
durée : 2 h
Platonov mais…
d’après Platonov d’Anton Tchekhov (éditions Solitaires intempestifs)
adaptation, conception et mise en scène : Alexis Armengol
Théâtre de l’Aquarium
Cartoucherie - Route du Champ-de-Manœuvre
75012 Paris
du mardi au samedi à 20 h 30, le dimanche à 16 h
du 23 mars au 15 avril 2012
photo © Marie Pétry - Platonov
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