Le sexe et les affaires ? Le sujet n’est guère nouveau… Mais l’enquête de Yvonnick Denoël, très documentée, offre des révélations inédites.
Ni moraliste ni voyeuriste, le livre Sexus Economicus lève le voile sur des sujets tabous comme la prostitution de luxe, largement utilisée dans les secteurs clés économiques : BTP, automobile, armement, pétrole, médias, finance, etc. En outre, il offre un éclairage nouveau sur des scandales sexuels comme la mort violente du banquier Edouard Stern. A la fois instructif et inquiétant !
Blog de Phaco : Le sexe apparaît dans votre livre comme le grand tabou des affaires. Mais n'en a t'il pas toujours été ainsi ?
Yvonnick Denoël : Certes, mais jusqu’à présent personne ne l’a écrit et décrit précisément ! Dans ce livre, qui n’a fait l’objet d’aucune poursuite judiciaire, je raconte dans les détails un certain nombre de cas avérés, dans lesquels des stars du monde des affaires ont été piégées par leur penchant incontrôlable pour le sexe. Et je remonte assez loin, jusqu’aux temps glorieux de Madame Claude notamment, qui travaillait déjà pour les exportations françaises en faisant choyer par ses pensionnaires les ministres et décideurs du monde entier, venus en goguette à Paris….
En lisant Sexus Economicus, l'on n'a pas l'impression que les conseils d'administration des grandes entreprises aient un grand pouvoir de contrôle envers les dirigeants qu'ils nomment, notamment quand ils prennent des décisions contestables, à la suite d'agréables « à-côtés »…
Yvonnick Denoël : Les administrateurs ont un regard sur les tableaux de bord comptables, les grandes décisions stratégiques, les contrats importants et les rémunérations des dirigeants, mais cela ne va pas plus loin. Le management dans les grandes entreprises ne fait pas l’objet d’un contrôle quotidien. De fait, les grands patrons et cadres sup bénéficient d’une grande latitude pour accepter ou refuser sur le terrain les « faveurs » qui leur sont proposées par des fournisseurs.
S'agissant des grandes entreprises, les médias ne cessent de dénoncer la corruption, mais la dimension « sexuelle » de leur fonctionnement économique semble plutôt occultée, voire suggérée sur le ton de la gaudriole. Pourtant sur cet aspect votre livre offre une vision d'ensemble du fonctionnement des grandes entreprises assez inquiétante..Le fait que des call-girls de luxe puissent influer sur des décisions économiques parfois chiffrées en millions, n'est-ce pas cela le dernier tabou des affaires ?
Yvonnick Denoël : Effectivement le sexe est un moyen de corruption omniprésent et qui ne laisse pas de traces. Disons qu’avec ce livre le tabou est un peu tombé, même si la pratique demeure sans aucun doute plus vivace que jamais, notamment en Asie : les services secrets chinois, d’après les professionnels du renseignement occidental, emploieraient plusieurs milliers d’amazones chargées de dépouiller les hommes d’affaires de leurs dossiers et données confidentielles. L’une d’entre elles a même convaincu un cadre de la DGSE de faire défection !
Les intermédiaires - véreux - semblent détenir un rôle extrêmement important dans cette planète économique internationale. Vous évoquez en détail certains de ces hommes, notamment dans les pages consacrées à la galaxie Khashoggi…Qui sont ces hommes ? L'argent est-il leur seule motivation ?
Yvonnick Denoël : Les intermédiaires, il y en a dans toutes les grandes affaires internationales (pétrole, armement, BTP, aviation, etc.) dans lesquelles le processus de décision du pays acheteur est complexe, les montants en jeu énormes et la concurrence féroce. Ils permettent de recourir à tous les moyens nécessaires pour emporter le marché, sans pour autant salir les mains de leurs donneurs d’ordre, qui font mine de tout ignorer si d’aventure un scandale éclate. Sans compter, parfois, la possibilité de rétro-commissions vers le pays donneur d’ordre…. Ces intermédiaires sont des hommes d’affaires audacieux, parfois « border line », au carnet d’adresses bien rempli, dotés d’un fort entregent. Ils sont habitués à évoluer dans des milieux très divers.
La mort du financier Edouard Stern a marqué l'opinion publique par sa violence mais aussi par son aspect sexuel. Dans Sexus Economicus, vous vous interrogez sur l'objectivité de la justice qui ordonne dans cette affaire la destruction des preuves et celle de la totalité des photos compromettantes.
Yvonnick Denoël : Je montre qu’en effet, la justice suisse a tout fait pour éviter les « déballages » sur les mœurs non seulement d’Edouard Stern mais aussi d’un milieu de banquiers, hommes d’affaires et politiques dans lequel il évoluait et qu’il symbolisait assez bien. Il y a sans doute eu un deal avec la défense d’Aurore Brossard, sa meurtrière, pour qu’on ne s’étende pas trop sur la vie nocturne de l’étrange couple Brossard-Stern et de ses proches. Encore plus étonnant, et surtout contraire à tous les usages en matière de preuve judiciaire, la justice a choisi de détruire plus d’un millier de photos prises par la jeune femme au cours de ces soirées… peut-être parce qu’elles mettaient en scène des personnalités éminentes ?
Dans ce domaine des affaires très opaque, tout semble fait pour déculpabiliser le sexe. Vous évoquez ces call-girls avant tout caractérisées par la convivialité, un humour soft, une culture générale et la connaissance de plusieurs langues. A leur sujet, vous évoquez le rôle de certaines agences…
Yvonnick Denoël : Jusqu’aux années 1990, il y a eu en effet des agences très haut de gamme qui proposaient leur catalogue de filles de haut niveau aux grandes entreprises et grands patrons. Je raconte comment le ménage a été fait depuis. Aujourd’hui, l’essentiel se passe sur Internet, avec des sites dont les commanditaires sont beaucoup plus difficiles à incriminer par la justice.
Vous évoquez les nombreux secteurs - BTP, automobile, armement, pétrole, médias, finance, etc. - qui utilisent le sexe pour parvenir à leurs fins économiques. Selon vous lesquels ont été - si l'on peut dire - les plus performants dans ce domaine pour rentabiliser leurs contrats ?
Yvonnick Denoël : Honnêtement tous ces secteurs sont de gros consommateurs, mais je dirais que la finance détient sans doute le pompon !
La collégialité sur le plan décisionnaire ne serait-elle pas un moyen de freiner certaines dérives de ce type dans les entreprises ?
Yvonnick Denoël : encore faudrait-il que cette collégialité ne soit pas exclusivement masculine ! Car le partage de prostituées est parfois une pratique fréquente, je pense en particulier au chapitre sur Volkswagen : pendant des années les principaux dirigeants et leaders syndicaux du groupe se sont payés du bon temps lors de coûteux séminaires de direction à l’étranger. Cela a très mal fini suite à un incident qui est raconté dans le livre…
Yvonnick Denoël, Sexus Economicus Le grand tabou des affaires, éditions nouveau monde, 300 pages, 2010
Super votre blog continuer ! Maintenant je sais quoi faire .
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