Au Théâtre Dunois Jean-Christophe Blondel met en scène le texte percutant et humaniste de François Hien. Avec en toile de fond la question du viol le spectacle La honte renouvelle notre regard sur la sexualité choisie et le comportement humain. A l'heure de Me Too et des réseaux sociaux le thème des violences sexuelles a pris une ampleur inédite, notamment le sexisme quotidien et le harcèlement sexuel des femmes. Le traitement théâtral de La honte se révèle original, dépassant le simple constat de bon ton sur la place des femmes dans la société ou sur l'inégalité des rapports hiérarchiques à l'université.
Subtilement mis en scène par Jean-Christophe Blondel ce drame nous raconte l'histoire banale d'une étudiante (Géraldine Ruben) se rendant un soir chez un professeur quinquagénaire (Louis Worms). Le spectacle nous montre cette même étudiante, quelques semaines plus tard, racontant pudiquement devant la commission disciplinaire de l'université le viol dont elle aurait été victime ce jour-là de la part du professeur.
Renonçant à hystériser ou à diaboliser ses personnages la mise en scène privilégie un climat théâtral sobre et explicatif, proche à la fois du thriller psychologique et du documentaire social intimiste . Et l'intéressant texte de François Hien fait particulièrement ressortir le caractère complexe de cette affaire de moeurs où chaque personnage n'apparaît jamais ni totalement blanc ni totalement noir. Dans une habile progression théâtrale, ponctuée d'un lancinant environnement musical de guitare électrique, La honte décortique chronologiquement toutes les étapes de ce drame : la soirée entre Géraldine et Louis, la dénonciation de Géraldine devant la commission disciplinaire, la convocation de Louis, les conclusions des membres de la commission.
Jamais ennuyeux, ce spectacle - qui dure près de 2 heures - interroge de façon cruciale la notion de consentement (celui de Géraldine), mais aussi à travers les quatre personnages de ce drame, enrobé parfois d'un certain humour, pose la question même de la subjectivité de l'interprétation des faits. Dans le rôle de ce professeur désinvolte gentiment anar et ayant réponse à tout John Arnold se révèle excellent.
Quant à Noémie Pasteger, elle atteint une grande intensité dramatique dans sa façon réaliste d'exposer, tout en le revivant, son histoire personnelle. Avec beaucoup de talent et une certaine drôlerie Yannik Landrein (Mathieu) et Pauline Sales (Clémence) interprètent deux sincères Sherlock Holmes universitaires, friands d'analyses fines et de vérité sociologique. Au final, l'on ne peut que recommander ce spectacle brillant et performatif, qui au-delà d'une stricte dénonciation des rapports de force homme-femme interroge sur un mode humaniste notre rapport subjectif à l'Autre.
durée : 1 h 50
La honteTexte : François Hien
Mise en scène : Jean-Christophe Blondel
Avec John Arnold, Yannik Landrein, Noémie Pasteger, Pauline Sales
Création musicale et musique sur scène : Rita Pradinas
Théâtre Dunois
7, rue Louise Weiss
Paris 13e
horaires : mardi 15 novembre (14 h 30), mercredi 16 novembre (19 h), jeudi 17 novembre (14 h 30),
vendredi 18 novembre (20 h), samedi 19 novembre (20 h)
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