lundi 1 mars 2021

Le Livre de mes rêves


Le Livre de mes rêves de Federico Fellini révèle peut-être la part la plus intime de son univers cinématographique à travers une impressionnante série de dessins. A l'occasion du centenaire de la naissance du réalisateur de La Strada et d'Amarcord les éditions Flammarion ont eu la bonne idée, douze ans après la première édition, de publier cet ouvrage culte dans une version revue et augmentée, accompagnée d'un corpus de contributions critiques et dans une nouvelle maquette. Le résultat éditorial se profile assez volumineux (près de 600 pages) et varié (450 illustrations), offrant au lecteur cinéphile une attrayante mine d'informations sur la cosmogonie fellinienne, qu'elle soit d'ordre géographique, culturelle, sentimentale ou érotique.


A l'origine Le Livre de mes rêves est constitué de deux grands livres de formats différents (le premier, le plus petit, mesure 25x35 cm ; le second, 34x48 cm), où Fellini, suivant les instructions de Bernhard, prit l'habitude de noter et d'illustrer ses rêves. Le premier livre (d'environ 245 pages) couvrait la période comprise entre le 30 novembre 1960 et le 2 août 1968 ; le second (154 pages) commençait en février 1973 et s'achevait en 1982 : vingt-deux ans donc, auxquels s'ajoutent des feuilles volantes et quelques notes datées de 1990. « Mieux vaut parcourir Le Livre de mes rêves de Federico Fellini non pas pour s'y livrer à une analyse indiscrète de son psychisme, mais plutôt pour y examiner le côté magique de son processus de création », nous avertit Simona Argentieri, psychanalyste en introduction du Livre de mes rêves de Fellini.


En effet le livre dépasse le simple cadre psychanalytique. Il est d'autant plus expressif que Fellini ne se contente pas d’écrire ses rêves, il les dessine. (Avant de se tourner vers le cinéma, il a d’abord été dessinateur humoristique pour une revue satirique à grand tirage, Marc’Aurelio). Entre 1960 et 1990 le cinéaste italien a rempli ses carnets de dessins et d'annotations, proposant ainsi au lecteur de découvrir son univers onirique. Cette oeuvre étrange est peuplée d'avions, d'astronefs, de lits, de montres, de bâtiments, de chiens, de chats et de femmes, de préférence velues et aux formes généreuses. Les dessins sont colorés et vifs, privilégiant l'aspect festif et caricatural, en cela tout à fait représentatifs de l'univers du maître de Cincecitta.


Cependant, Le Livre de mes rêves va au delà des codes traditionnels de la BD. Ce n'est pas non plus le scénario en images d'un film. Fellini privilégie plutôt dans cette oeuvre hybride une forme mixant à la fois dessin humoristique et tentative de journal intime. En outre, c'est une véritable cosmogonie de ses films, où l'on retrouve bon nombre de ses obsessions et thèmes favoris. Comme le rappelle justement dans l'ouvrage le critique et historien Gian Piero Brunetta : « Replacé aujourd'hui dans le corpus global des oeuvres de Fellini, Le Livre de mes rêves semble se situer au coeur de Fellini, et nous aide à y prendre la mesure de nombreux frémissements créatifs. » Le Livre de mes rêves fait partie de ces ouvrages que tout amateur de cinéma, ou simplement de beaux livres aura plaisir à consulter souvent. Dans sa préface Daniel Pennac a cette formule, belle et définitive, qui résume assez bien le message de l'ouvrage :
« Rêver c'est vivre, Fellini le savait...» 

Federico Fellini, Le Livre de mes rêves, avec un texte inédit de Daniel Pennac, éditions Flammarion, hors collection, relié, 584 pages, 450 illustrations, 2021












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