Inspiré d’un court métrage de Sorogoyen Madre est son cinquième film. Le cinéma de Rodrigo Sorogoyen privilégie les histoires intimistes avec des personnages ambivalents. Après Stockholm (2013) et ses deux thrillers Que Dios nos pardone (2016) et El Reino (2018) le cinéaste retrouve Isabel Pena sur Madre dans son travail de coécriture. L’histoire nous plonge au cœur d’une fêlure secrète, celle d’une femme (Elena) dévastée par la perte de son fils de 6 ans.
Madre
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Evitant soigneusement le piège du pathos ou même la tentation moralisatrice du portrait psychologique le réalisateur nous montre sur un mode naturaliste distancié - et à travers le choix d’une image léchée mais sans maniérisme - les multiples jeux de chat et souris qui président aux rencontres entre Jean et Elena. Davantage : il nous suggère toute la complexité de cette relation ainsi que celle du personnage principal féminin. Sorogoyen semble refuser l'idée de la présenter sous l’angle de la folie ou même d’une quelconque névrose. Le titre même de son long-métrage (madre : mère) sert de révélateur.
Madre
Au fond ce qui semble l'intéresser c’est de marquer, davantage encore que la puissance de l’élan maternel chez Elena, le ressenti fondamentalement hostile que ce dernier entraîne chez les autres. C’est un beau rôle pour Marta Nieto, que l’on avait déjà remarquée dans The Chase (2013) de Daniel Calparsoro. L'actrice évolue naturellement dans ce personnage de femme hésitante, blessée par un amour maternel consumé et dévorée progressivement par une attirance trouble pour Jean. Quant à Jules Porier il adopte un ton juste et naturel dans son personnage d’ado jovial et tourmenté, pris en tenailles entre le regard censeur d'une famille aimante et l'amour étrange et informulé que lui porte la trentenaire.
Madre
Toujours sur ce même mode réaliste suggestif Madre décrit subtilement les effets dévastateurs que cette relation platonique entraîne, de la déstabilisation de la famille de Jean à la mise en péril du couple formé par Elena et Joseba. Au final le réalisateur espagnol avec Madre nous propose un film délicat et atmosphérique ainsi qu'une réflexion piquante et inédite sur la place de l'amour maternel dans nos sociétés.
durée : 2 h 10
Madre, un film de Rodrigo Sorogoyen
Avec Marta Nieto (Elena), Jules Porier (Jean), Alex Brendemühl (Joseba), Anne Consigny (Léa), Frédéric Pierrot (Gregory), Guillaume Arnault (Benoit)
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