lundi 9 mai 2022

Nitram

 

Dans son cinquième long métrage Nitram, Justin Kurzel [Macbeth (2015), Le Gang Kelly (2019)]  nous plonge dans un oppressant  thriller psychologique et  social, questionnant  le mystère des crimes de masse.
Depuis Les Crimes de Snowtown (2011), son premier film, ce réalisateur australien s'intéresse aux mécanismes de la violence chez les adolescents sans pour autant s'inscrire dans un cinéma manichéen. Inspiré par le contexte  familial des tueries de masse le réalisateur australien a jeté son dévolu sur le scénario de Shaun Grant. Ce dernier a été fortement impressionné par la tragédie de Port-Arthur (1996), qui coûta la vie à 35 personnes.

Nitram

Et Kurzel  dans son film  fait le pari délicat de retracer le parcours du tueur de Port-Arthur, Martin Bryant, surnommé  « Nitram », privilégiant une vision cinématographique à la fois distanciée et expressive. Pour interpréter ce tueur impitoyable, adepte dès son plus jeune âge de pétards et feux d'artifices, il a choisi l'acteur Caleb Landry Jones, que l'on avait pu voir entre autres dans le drame fantastique Byzantium de Neil Jordan  et dans le drame criminel God's Pocket de John Slattery. Pout Nitram Kurzel s'est intéressé exclusivement à l'avant du crime.

Nitram

Et d'une certaine façon son long métrage peut être perçu comme un habile description à la fois de son milieu familial immédiat et de son personnage principal, de l'enfance à juste avant le crime. Dans Nitram le réalisateur privilégie une narration réaliste qui sait prendre son temps, mettant plutôt l'accent sur le désarroi des proches de Nitram et leur difficile interaction avec cet ado mentalement instable, ne parvenant jamais véritablement à  communiquer avec les autres à cause de ses frasques et de ses accès de violence.

Nitram

Avec un certain talent  Kurzel s'inscrit dans un cinéma intimiste douloureux,  nous montrant Nitram, abonné aux antidépresseurs et bénéficiaire d'une pension d'invalidité, comme  l'éternel repoussoir du voisinage. Il nous le dépeint, coincé entre une mère anxieuse et un père absent.  Dans ce rôle d'adolescent paumé et imprévisible  Caleb Landry Jones s'en sort tout à fait honorablement, à la fois imprégné par le côté tragique du personnage et sa  solitude désespérée. La rencontre  de Nitram avec la riche et marginale Helen et la description de son installation dans sa maison contribue  à  donner au film une touche moins dure. D'une certaine façon cette mystérieuse femme, aussi murée dans des soucis, et qui  paraît accepter Nitram comme il est (le laissant habiter dans sa maison), humanise le personnage.   

Nitram

Cependant,   Nitram se profile comme  une implacable tragédie.  En effet, le personnage principal  provoque, par l’une de ses réactions, un accident à la suite duquel sa bienfaitrice meurt. A partir de ce point de non-retour la violence de Nitram et sa pulsion de mort nous est suggérée dans toute son effrayante puissance. Au final, Nitram est une étude de mœurs plutôt bien menée. Distillant en permanence un climat  à la fois suggestif et inquiétant Nitram questionne la difficulté  et l'incompréhension de nos sociétés modernes à apprivoiser la violence et la mort. 

durée : 1 h 50
Nitram, un film de Justin Kurzel, drame/thriller, 2021, Australie
Avec Caleb Landry Jones, Essie Davis, Anthony LaPaglia 
Nitram






Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire