Avec
L’envolée Eva Riley propose un film incisif et intimiste sur l’univers de l’adolescence.
Scénariste et réalisatrice écossaise
Eva Riley avait en 2016 écrit et réalisé pour la BBC le court-métrage
Diagnosis qui lui valut d’être repérée « Star of Tomorrow » par Screen International.
L’envolée, dont l’histoire se passe dans la banlieue de Brighton, est son premier long métrage. Le personnage central (
Leigh) est une gymnaste de 14 ans qui s’entraîne intensivement en vue d’une compétition. L'ado se trouve coincée entre un père bougon et le souvenir nostalgique d'une mère récemment disparue.
L'envolée
L’envolée s’attache à décrire sur un mode à la fois suggestif et réaliste le changement psychologique de
Leigh à la suite de l’arrivée et de l’installation d’un demi-frère (
Joe) plus âgé. Ce dernier l’orientera progressivement vers la petite délinquance.
L’envolée est un film plutôt lent (surtout dans sa 1re moitié, moins réussie) avec des dialogues espacés. Ce climat cinématographique entre chien et loup est porté par les gros plans de visage des deux ados et par une intéressante lumière diffuse soulignant - à travers les alentours de Brighton - une certaine esthétique campagnarde.
L'envolée
Réalistes et complexes les personnages de
Leigh et
Joe échappent habilement aux stéréotypes cinématographiques sur les jeunes. L’attirance trouble de
Leigh pour son demi-frère lui fait faire des choses répréhensibles, qui l’écarte progressivement de sa passion sportive. Dans
L’envolée la réalisatrice, sans manichéisme, nous suggère aussi, à travers le personnage de
Rob, le pouvoir de domination mentale de la bande sur
Joe, personnage finalement plutôt maladroit et craintif. Dans de courtes scènes de la vie quotidienne filmées sur le mode naturaliste (courses de motos, promenades campagnardes, scènes familiales) la réalisatrice met tout autant en exergue la relation ambiguë de Leigh avec son demi-frère que l’effritement progressif de l’intérêt de
Leigh pour son univers gymnastique.
L'envolée
Néanmoins à partir de l'image symbolique de couple délinquant elle n’en tire aucun effet social dramatique gratuit, contrairement par exemple à un film comme
Shéhérazade (2019) de
Jean-Bernard Marlin, archétype d'un romantisme larmoyant, ethnique et puéril, ce qui sans doute a valu à ce long métrage nullissime d'être primé trois fois. En outre, la réalisatrice a eu la bonne idée de chercher ses deux acteurs en dehors de milieux marginaux et dans un univers non professionnel. Visiblement ils ont été capables d’improviser certaines scènes et surtout d’apporter quelque chose de personnel.
L'envolée
Frankie Box déploie beaucoup de naturel dans son interprétation de jeune gymnaste écartelée entre son attirance trouble pour son demi-frère et sa conscience malheureuse d’être l'otage de sa discipline sportive. Dans un rôle de petit dur tendre coincé entre les diktats de sa bande et sa relation fraternelle envers
Leigh Alfie Deegan déploie un talent certain. Et finalement
Eva Riley parvient à interroger bien au-delà de la thématique de la performance sportive. Dans
L’envolée elle propose un regard original et poignant sur la solitude contemporaine de deux adolescents.
durée : 1 h 23
L'envolée, un film de
Eva Riley, drame, Royaume-Uni, couleur/VO anglais et français
Avec
Frankie Box (
Leigh),
Alfie Keegan (
Joe),
Sharlene Whyte (
Gemma),
Will Ash (
Rob)
L'envolée
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