Après la publication de la correspondance de son père et de témoignages personnels sur le parcours de son épouse
Claude,
Alain Pompidou nous raconte la longue histoire de leur passion artistique dans
Pour l’amour de l’art, une autre histoire des Pompidou.
Agrémenté de nombreuses illustrations et écrit en collaboration avec
Gérard Armand - jeune journaliste économique et politique amateur d’art -
Pour l’amour de l’art est un ouvrage, qui présente un double intérêt. D’abord, il nous rappelle l’insatiable curiosité intellectuelle des
Pompidou pour l’art contemporain (que l’on connaissait déjà un peu), mais aussi pour d’autres d'autres domaines comme la littérature, la poésie, la musique, la mode… Egalement, à travers cet attachement artistique inédit, il nous montre en quoi leur vision de la culture fut particulièrement intuitive et moderne, voire bien en avance par rapport à leur époque. Dans une langue simple et sans portée panégyriste les deux auteurs nous racontent une histoire parfois méconnue, comme celle - insolite - de la gestation du célèbre centre culturel Beaubourg, qui ne devait se concrétiser qu’en 1977, soit trois ans après la mort de son initiateur,
Georges Pompidou.
Visite à la Fondation Maeght, août 1972 : rencontre avec Marc Chagall © DR
Emblématique d’un véritable décloisonnement culturel, l’idée d’un centre réunissant musée d’art contemporain, bibliothèque, lieu de recherche industrielle et technique obséda longtemps le deuxième président de la Ve République. Par une citation de
Claude Pompidou dans le livre, on apprend d’ailleurs que l’idée de ce centre germait dans l’esprit de son mari depuis… les années 50 ! Ouvrage parsemé de repères biographiques,
Pour l’amour de l’art nous rappelle que bon nombre d’artistes étaient également des amis du couple présidentiel, fin collectionneur de leurs oeuvres.
Les Buffet,
Tinguely,
Saint-Phalle,
Soulages comptaient parmi le cercle le plus intime. Au fil des pages, l’on découvre d’autres personnalités diverses, qui faisaient partie de la vaste mythologie esthétique pompidolienne : le couple
Malraux,
de Staël,
Hartung,
Klein,
Vasarely,
Raysse, Agam, Fontana, Boulez… Au passage
Alain Pompidou rappelle l’intérêt de sa mère pour les métiers de la mode et les grands couturiers. A la fin de sa vie
Claude pompidou fit d'ailleurs don de plusieurs robes du soir au musée des Arts décoratifs. (Après sa mort,
Alain Pompidou céda au même musée une vingtaine de tenues choisies - chapeaux, chaussures, sacs et gants).
Bar à autruches, de François-Xavier Lalanne, 1966
© Bridgeman Images © ADAGP, Paris, 2017
Le sentiment de culture chez les
Pompidou se révèle au fil des pages comme une passerelle, un mode de transmission intemporel. Citée,
Claude Pompidou parlait ainsi de sa conception de l’art : « Ce que j’aime dans l’art, c’est précisément sa richesse et sa diversité ; la facilité de changer d’univers et d’époque. Il y a le passé et son legs. Il y a le présent et ses découvertes. » La lecture du livre en tout cas nous suggère parfois un aspect « presque religieux » du rapport à l’art du couple
Pompidou, qui comptait parmi leurs amis le père
Couturier (*), un religieux dominicain féru d’art contemporain.
Claude Pompidou l’évoquait ainsi (page 49) : « Le père Couturier (…) eut sur mon mari et moi une grande influence. Les longues conversations que nous eûmes avec lui, sur la religion, sur l’art, nous marquèrent. Il rayonnait d’un feu intérieur qui fascinait et révélait l’ardeur de sa foi, laquelle n’avait d’égale que son ardeur pour l’art. » Au final,
Pour l'amour de l'art s'avère un ouvrage très intéressant, qui en plus d'éclairer le lecteur sur la personnalité du couple présidentiel remet en mémoire les polémiques et vifs débats au cours des années 60/70 portant sur les enjeux artistiques.
* Marie-Alain Couturier (1897-1954), père dominicain, ami des plus grands artistes contemporains et théoricien de l’art sacré
Alain Pompidou et
César Armand,
Pour l'amour de l'art, une autre histoire des Pompidou, éditions Plon, 264 pages, 2017
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