Marcel Duchamp, Les joueurs d’échecs (1911)
Dans cette tradition sarcastique du détournement de l’objet fortement médiatisée Duchamp fait figure de roi partageant comme Dali ou Warhol un sens certain de la dérision et du cynisme, préfigurant d’une certain façon les Koons et les Hirst d’aujourd’hui. Comme le signale le terme explicite de l’expo « la peinture même », les œuvres présentées au Centre Pompidou nous plongent directement dans les premiers émois artistiques de cet artiste français naturalisé américain glorifié justement par les historiens d’art pour son « antiart ».
Nourri d’influences diverses, le cheminement artistique de Duchamp se profile des plus intéressants. Au fil des salles abritant les tableaux exposés, le visiteur peut suivre les pérégrinations picturales de ce précurseur de dada vers les rivages du fauvisme, du symbolisme, du futurisme ou du cubisme. C’est d’ailleurs au sein de ce dernier mouvement que la peinture de Duchamp semble la plus convaincante. Une élégance stylisée imprégnée de raffinement géométrique caractérise des tableaux comme Nu descendant un escalier (1912) ou Les joueurs d'échecs (1911). Mais l’on dénote aussi une sécheresse professorale dans ces compositions. (Egalement, Marcel Duchamp - La peinture, même présente les sources principales d’inspiration du peintre emblématique - littéraire, technique, scientifique, cinématographique.) Hélas, parfois confus, le parcours thématique de l’expo n’échappe pas à un jargon pesant comme dans l’extrait suivant :
[La polysémie de l’idée du « passage » - géométrique, chimique, psychologique, physiologique, sexuelle ou métaphysique - est volontairement explorée. Sa technique tend à se rapprocher des glacis des Vénus de Cranach, qui préfigure la transparence du Grand Verre].
Duchamp a révolutionné l'avant-garde du XXe siècle en changeant la perception même de l’art. Et la nouvelle expo du Centre Pompidou nous révèle qu’il fut un peintre accompli. Mais en 2014, quand déjà depuis pas mal de décennies les artistes sont tous peu ou prou conceptuels, la modernité de Duchamp - encombrée de charabia théorique et des systèmes de pensée de l’avant-garde de son époque - est-elle toujours si vive ? Au final, la peinture de Duchamp dégage assez peu d’émotion et peut susciter un certain ennui. Si l’on veut approcher une modernité beaucoup plus excitante et moins cérébrale, l’on conseillera plutôt d’aller voir au Grand Palais l’expo consacrée à Niki de Saint Phalle ou de visiter le Musée Picasso, récemment rénové.
Expo « Marcel Duchamp - La peinture, même (1910-1923) »
Centre Pompidou (galerie 2, niveau 6)
Paris 4e
Tous les jours sauf le mardi, de 11 h à 21 h
jusqu’au 5 janvier 2015
Marcel Duchamp
[La polysémie de l’idée du « passage » - géométrique, chimique, psychologique, physiologique, sexuelle ou métaphysique - est volontairement explorée. Sa technique tend à se rapprocher des glacis des Vénus de Cranach, qui préfigure la transparence du Grand Verre].
Duchamp a révolutionné l'avant-garde du XXe siècle en changeant la perception même de l’art. Et la nouvelle expo du Centre Pompidou nous révèle qu’il fut un peintre accompli. Mais en 2014, quand déjà depuis pas mal de décennies les artistes sont tous peu ou prou conceptuels, la modernité de Duchamp - encombrée de charabia théorique et des systèmes de pensée de l’avant-garde de son époque - est-elle toujours si vive ? Au final, la peinture de Duchamp dégage assez peu d’émotion et peut susciter un certain ennui. Si l’on veut approcher une modernité beaucoup plus excitante et moins cérébrale, l’on conseillera plutôt d’aller voir au Grand Palais l’expo consacrée à Niki de Saint Phalle ou de visiter le Musée Picasso, récemment rénové.
Expo « Marcel Duchamp - La peinture, même (1910-1923) »
Centre Pompidou (galerie 2, niveau 6)
Paris 4e
Tous les jours sauf le mardi, de 11 h à 21 h
jusqu’au 5 janvier 2015
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