lundi 9 décembre 2019

Lillian


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Avec Lillian l’Autrichien Andreas Horvath signe un film étrange et prenant avec en toile de fond la solitude et les grands espaces américains.

Lillian a comme point de départ l’histoire vraie d’une femme russe vivant dans les année 1920 à New York, qui décida faute d’argent de rentrer à pied dans son pays. C’est la première œuvre de fiction d’un réalisateur spécialisé dans les films documentaires. Horvath nous décrit le long voyage de ce personnage féminin appelé Lillian, parcourant l’Amérique profonde pour tenter d’atteindre l’Alaska et traverser le détroit de Béring. D'un New York architectural aux champs de maïs du Midwest en passant par les paysages enneigés de l’Alaska et le long sillon de la rivère Yucon le cinéaste nous transporte dans cette Amérique géante, ivre de nature et d’espaces infinis.

Lillian

Il nous montre aussi son enfer urbain à travers ses autoroutes labyrinthiques et ses innombrables ruines industrielles. Outre une esthétique forte le film se distingue par l’absence de dialogues du personnage principal. Interprétant de façon détachée et réaliste Lillian Patrycja Planik ne montre aucune émotion particulière dans son jeu. Lent et suggestif le film nous montre cette jeune femme que l'on pourrait qualifier de SDF dans les actes les plus élémentaire de son quotidien : fouiller les poubelles pour manger, dormir dans la forêt ou dans des maisons désertées, sécher ses vêtements au soleil, se doucher dans la nature. Décrivant les régions parcourues le film nous la montre par exemple assister à une épreuve  de stocking car ou à un meeting politique défendant le droit des tribus indiennes.

Lillian

On pourra trouver le personnage de Lillian un peu mécanique, voire inconsistant et le film parfois ennuyeux par son fatalisme sociologique latent. Prévenons quand même que Lillian est tout le contraire d'un road-movie style Thelma et Louise. Ce drame silencieux évolue sans petite histoire au scénario bien ficelé, sans personnages charismatiques, sans petits ou grands méchants. Cependant, l’on perçoit bien que l’héroïne ou plutôt l’anti-héroïne ne porte pas vraiment l’Amérique à son cœur. (Le début du long métrage nous apprend que la jeune femme immigrée - dont le visa a expiré - évolue dans le milieu pornographique, et ne peut plus travailler aux USA.) Le charme du long métrage est sans doute ailleurs, dans un climat subtilement entretenu, notamment par les personnages dits secondaires, dont la plupart d’ailleurs, rencontrés par hasard par le cinéaste, jouent leur propre rôle : shérif, conducteur de pick-up, vendeuses…

Lillian

Avec Lillian le réalisateur autrichien nous propose un cinéma à la fois sociologique et poétique, qui suggère finement certains traits culturels profonds de l’Amérique profonde et qui interroge sur les mentalités provinciales sans pour autant céder au didactisme et au snobisme antiaméricain (très à la mode, surtout chez les élites). Sous une forme cinématographique agréable Horvath a trouvé un angle original. Il  propulse sa vision de l'Amérique à travers le positionnement étrangement silencieux d'une jeune femme d'aujourd'hui en fuite. Un regard féminin  qui déshabille l'Amérique provinciale un peu beauf à travers ses petites villes, ses routes poussiéreuses, ses bars, ses magasins, ses motels, ses mobile-homes et ses terrains de jeux.  Lillian puise son étrange saveur de ce questionnement sans réponse. A la fois vision fulgurante des paysages de la nature et approche subjective de la vie dans les petites villes américaines Lillian est un film à découvrir !

durée : 2 h 10

Lillian, un film de Andreas Horvath, Aventure, drame, Autriche, 2019
Avec Patrycja Planik

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