lundi 11 mars 2019

Les Rivaux



A  l’Artistic Théâtre Anne-Marie Lazarini met en scène Les Rivaux (1775), première pièce de  Richard Brinsley Sheridan (1751-1816). Inspirée par cette comédie cocasse, truffée de fines allusions sur les mœurs aristocratiques de l’Angleterre du XVIIIe siècle, elle nous propose un spectacle alerte, étonnant et drôle. 


Quoique auteur de  neuf pièces et à l’origine d’un style original de comédie burlesque mêlant à la fois morale, frivolité et vie mondaine, Sheridan est un peu oublié aujourd’hui. Celui-ci dirigea  le théâtre Drudy Lane de Londres et abandonna totalement le théâtre pour se consacrer  à une carrière politique vers la trentaine. Œuvre de jeunesse,  Les Rivaux emprunte subtilement les codes de la comédie romantique pour mieux les détourner de façon humoristique. Dans cette comédie peuplée de personnages pittoresques (Mrs Malaprop, Falkland, Sir Anthony Absolute…), d’affects et de situations rocambolesques (enlèvement, duel, passion, jalousie), le spectateur retrouve un peu l’esprit de Molière, de Goldoni voire de Marivaux.  Les sentiments y sont capricieux et les personnages à géométrie variable, déployant une énergie incroyable  à changer d’identité du matin au soir,  à se justifier, à s’aimer  ou à se quereller. Valets roublards, amoureux, mythomanes, jaloux, poltrons,   père irascible, tante snob..., autant de personnages diversifiés qui ponctuent cette vaste fresque théâtrale aux enchevêtrements comiques.  Sentimentalisme exacerbé, argent, mariage, déplaisir, honneur… Tout y passe !  Avec une irrévérence toute britannique  et l’esprit spirituel caractérisant le théâtre du XVIIIe Sheridan décortique sur le mode sentimentalo-burlesque la grande confusion des idées et des sentiments.  Comme chez Feydeau ou Labiche, la comédie de Sheridan prend appui sur une savoureuse série de quiproquos.  Dans Les Rivaux Sheridan titille le spectateur, distillant en permanence le doute sur l’identité réelle de ses personnages. Il va même beaucoup plus loin, nous suggérant leur représentation intime du monde. En cela le personnage principal Captain Jack Absolute, alias Beverley apparaît  assez proche de celui de Kean, immortalisé par Alexandre Dumas  dans sa pièce éponyme. Très professionnels les comédiens se faufilent  comme dans un poisson dans l’eau dans cette schizophrénique comédie de caractères. Outre l’expressivité des costumes d’inspiration historique, l’on signalera la scénographie simple mais attrayante. De légers rideaux peints offrent aux comédiens le moyen furtif de se déplacer d’un lieu à l’autre. Au final, Les Rivaux est un spectacle spirituel et mordant, explorant les excentricités de l'aristocratie anglaise du XVIIIe siècle.  

durée : 1 h 45

Les Rivaux, de Richard Brinsley Sheridan
Traduction et adaptation : Sylviane Bernard Gresh et Frédérique Lazarini
Mise en scène : Anne-Marie Lazarini
Avec Alix Bénézech (Lydia), Cédric Colas (Capitaine Absolute), Charlotte Durand-Raucher (Julia), Bernard Malterie (Faukland),  Philippe Lebas (Acres), Thomas Le Douarec (Sir Anthony Absolute)Willy Maupetit (Fag), Sylvie Pascaux (Lucy)Catherine Salviat (Mrs Malaprop),  Marc Schapira (Sir Lucius)

Artistic Théâtre
45 bis rue Richard Lenoir
Paris 11e
horaires : mardi  (20 h) ; mercredi, jeudi (19 h) ; vendredi (20 h 30) ; samedi (16 h 30 et 20 h 30) ; dimanche (16 h) ; relâche lundi

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