lundi 3 juillet 2017

Anna




Avec Anna, le réalisateur franco-colombien Jacques Toulemonde signe un premier long métrage émouvant et rythmé. Le film évolue entre drame familial et road movie psychologique.


Jacques Toulemonde est l’auteur de courts métrages et de scénarios. Il a cosigné celui de L’Etreinte du serpent (2015) et a été assistant réalisateur sur plusieurs films de jeunes cinéastes colombiens, dont Los Viajes del Viento, le 2e long métrage de Ciro Guerra. Dans un registre dramatique qui fait coexister par moments un parfum de comédie, l’histoire d’Anna a pour point de départ un départ précipité.

Anna

Une jeune femme (Anna) ne supporte plus la garde alternée de son fils de 10 ans (Nathan) avec son ex-mari (Philippe). Elle décide de retourner en Colombie, son pays natal, en compagnie de son petit ami et de Nathan. Anna souffre de trouble bipolaire, dirait-on aujourd’hui. Et tout au cours de son film, le réalisateur nous montre le personnage principal évoluant dans son nouveau quotidien, tenaillée entre enthousiasme trop grand et réactions émotionnelles parfois dangereuses. Cependant, dans Anna, Toulemonde ne cherche pas particulièrement à mettre des mots sur le trouble exact dont souffre Anna.

Anna

A travers ce road movie familial, il s’attache plutôt à décrire sur un mode vif et réaliste parfois cocasse les pérégrinations de cet atypique trio qui joue là un jeu dangereux. De la petite maison coquette de l’oncle d’Anna - qui héberge le trio au début de son improbable voyage - aux hôtels miteux de province, Anna met en exergue une Colombie à l’écart des circuits touristiques, celle des petites bourgades de campagne et de simples villageois. Très convaincante, Juana Acosta interprète la fantasque et instable Anna.

Anna

Cette comédienne colombienne se glisse naturellement dans le rôle de cette jeune femme au rire un peu sauvage, vivant au jour le jour dans le culte et l’obsession de son fils un jeu dangereux avec la réalité et la justice d’un pays qu’elle vient de quitter. Subtilement, sans porter de jugements de valeur sur son personnage féminin, le cinéaste nous en suggère néanmoins toutes les peurs irrationnelles qui se dissimulent sous ses rires enfantins et un peu forcés. D’ailleurs, le film échappe au piège du mélo moderne contemporain, friand, lui, de personnages stéréotypés et envisagés sur un mode souvent trop prévisible (politique, sexuel, féministe ou racial).

Anna

Il y échappe d’autant plus que le trio se profile à la fois atypique et presque ordinaire (!). Egalement, l’on signalera l’excellente prestation de Bruno Clairefond, dans un rôle de petit ami diplomate et joyeux. Enfin, par son enthousiasme juvénile et sa façon mélancolique d’interroger du regard le déséquilibre de sa mère, Kolia Abiteboul Dosseto contribue à donner au film une épaisseur certaine. Quoique différent sur le fond, Anna n’est pas sans rappeler par son climat étrange et perturbant Dans la forêt [sorti début 2017] de Gilles Marchand, orientant tous deux le spectateur vers une dramaturgie de l’errance. Par sa forme énigmatique de drame familial et par son climat de thriller psychologique vénéneux aux senteurs de Colombie, Anna se révèle un film des plus convaincants !

durée : 1 h 36

Anna, un film de Jacques Toulemonde, drame, France/Colombie, 2017

Avec Juana Acosta (Anna), Kolia Abiteboul (Nathan), Bruno Clairefond (Bruno), Alexandre Legrand (Philippe)

Anna

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