lundi 6 février 2017

American Honey




Avec American Honey, Andrea Arnold [Fish Tank (2009)] signe un road movie alerte et teinté de réalisme social, rythmé par les déambulations humoristiques d’un groupe de commerciaux parcourant le Mid West.


Inspiré par le mode de vie atypique de nombreux jeunes démarcheurs sillonnant les Etats-Unis dans l’espoir de vendre des abonnements à des magazines - comme le faisaient les marchands itinérants du passé - American Honey peut être perçu sous de nombreux angles : critique de l’American way of life à travers la dénonciation sarcastique des méthodes « psychologiques » de marketing direct, évocation d’une certaine jeunesse marginalisée évoluant entre désir d’intégration et peur du monde adulte, quête spirituelle des grands espaces américains, affirmation d’un certain hédonisme ancré sur la vie en communauté sur les routes, entre amours passagères et plaisirs alcoolisés... 

American Honey

Toutes ces thématiques se profilent discrètement dans ce film ambitieux d’une réalisatrice, dont c’est le premier long métrage tourné entièrement aux USA. Heureusement pour le spectateur, American Honey échappe au manichéisme de bon nombre de road movies trop politisés et s’affiche comme un bon film réaliste avec un  fort climat, un zeste d'amertume et une spontanéité rafraîchissante. Sans doute est-ce dû pour une large part au choix d’Andrea Arnold, qui a privilégié de jeunes acteurs non professionnels. (Le principal personnage du film Star est interprété par Sasha Lane, une étudiante texane de 20 ans qui fait là ses premiers pas devant la caméra.) A travers American Honey, c’est toute une Amérique aux bords des marges qui défile sur fond de motels miteux, de routes interminables et de rave parties. Même si le film - d’une durée de près de 3 heures - pèche par certains clichés (trop de musique, plans répétitifs sur le van), il n’en reste pas moins tonique et brillant par sa méticuleuse description d’une petite communauté de vendeurs tiraillée entre problèmes relationnels, loisirs hédonistes et techniques agressives de vente. 

American Honey

Subtilement, Andrea Arnold fait circuler ses jeunes personnages et les confronte aux « autochtones » dans le décor diversifié des Etats-Unis, des plaines de l’Oklahoma et du Kansas aux environs luxuriants et verdoyants du Nebraska, en passant par les terrains pétroliers de Williston et la réserve indienne de Pine Ridge dans le Dakota du Sud. A la fois grave et léger, mêlant subtilement esprit de dérision et inquiétudes métaphysiques propres à la jeunesse, American Honey se révèle un film aussi incisif qu’aventureux, renouant avec les puissants mythes de l’Amérique éternelle.

durée : 2 h 43

American Honey, un film d’Andrea Arnold, Royaume Uni, 2016
Avec Sasha Lane (Star), Shia Labeouf (Jake), Riley Keough (Krystal)

American Honey

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