Que peut-on faire pour qu’un enfant malade et condamné garde le goût de vivre ? Le texte curieux de Jean-Benoît Patricot décrivait le projet obstiné d'une mère (Claire) vivant dans l'obsession de faire revivre à son fils (Darius) des souvenirs heureux de sa vie en demandant à un créateur de parfums renommé (Paul), mais en panne d’inspiration depuis la mort de sa femme, de recréer des effluves pour permettre à son fils de se rappeler les lieux et circonstances des bonheurs passés.
Poétique, touchant et parfois drôle Darius nous rappelle que le sens qui interagit le plus avec la mémoire est l’odorat. En effet, les parfums sont les réceptacles les plus durables de nos souvenirs. Et le fils de Claire, victime dans l'histoire d’une maladie dégénérative, n’a plus que deux sens en fonction : l’odorat et le toucher. Adapter ce texte dans un spectacle non olfactif n'était pas une mince affaire.
© Jean-François Delon
Darius - Théâtre de l'Essaïon
Et subtilement, André Nerman, sans pathos, met en scène ce drame poignant dans un spectacle qui met en exergue le courage et le dévouement d'une mère, mais aussi l'entêtement d'un créateur de parfums cherchant constamment à dépasser ses propres limites. Dans la peau d'une mère prête à tout pour égayer les derniers mois de vie de son fils Catherine Aymerie adopte un jeu tout en nuance, tiraillée à la fois par la hauteur de sa mission et un certain sens de la dérision.
Quant à François Cognard, qui interprète Paul, il se faufile habilement dans ce rôle de créateur de parfum interpellé par une détresse humaine et trouvant dans ce nouveau travail une stimulation intellectuelle. A travers l'échange épistolaire de Claire et Paul et en l'absence d'odeurs le spectateur est invité à deviner ces effluves, rescapés magiques des nombreux voyages de Darius au temps où il pouvait se déplacer librement.
Des parfums au nom évocateurs comme « Rochefort sous la pluie », « Rome », « Métro parisien » ou encore « TGV », qui de Jacques Demy à Stendhal, ont pour vocation de procurer à Darius d' ultimes évasions. Au final, Darius se profile un spectacle original, tant par le thème abordé que par son écriture ciselée et la qualité de jeu des comédiens !
durée : 1 h 15
Darius, de Jean-Benoît Patricot (texte : éditions Riveneuve / Archimbaud)
Mise en scène : André Nerman
Avec Catherine Aymerie et François Cognard
Théâtre de l'Essaïon
6, rue Pierre au Lard
Paris 4e
horaires : jeudi, vendredi, samedi à 21 h, le dimanche à 18 h
jusqu'au 11 décembre 2022
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