Valentin de Boulogne. David et Goliath (1616) © Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid
Comme ses contemporains Ribera et Manfredi, Valentin de Boulogne est réputé pour ses étonnants tableaux baignant dans de forts contrastes d’ombres et de lumière. D’emblée, l’étrangeté de sa peinture frappe nos yeux par son climat réaliste entre chien et loup, un penchant certain pour le morbide [dans Le martyre de saint Barthélémy (1615), un bourreau écorche un vieil homme ; dans David et Goliath (1616), une tête coupée du géant gît comme trophée], le goût pour les motifs mythologiques et religieux ainsi que par une stylisation imprégnée de modernité. L’on connaît peu la vie de cet artiste marginal, bien éloigné des codes classiques de compatriotes comme Poussin et Vouet.
Valentin de Boulogne. Christ et la femme adultère.
J. Paul Getty Museum LA © J. Paul Getty Museum, Los Angeles
Ce fils de peintre-verrier eut davantage d’affinités avec les expérimentations autrement aventureuses d’un Caravage. A Rome il mène une vie dissolue, côtoyant la fantasque compagnie des « Bentvueghels », un groupe fêtard de jeunes artistes originaires des Pays-Bas. Protégé par de puissants mécènes romains, il n’aura d’ailleurs guère le temps de profiter de sa fraîche gloire. A 41 ans il est emporté par une violente fièvre à la suite d’une soirée de beuverie. Cette première rétrospective consacrée à Valentin nous fait découvrir un peintre qui fut longtemps éclipsé par Georges de La Tour (1593-1652), autre génial metteur en scène de savants effets de lumière. A travers le clair-obscur des tableaux allégoriques de Valentin, ce dernier nous laisse subtilement deviner la psychologie de personnages à la fois simples et complexes. Comme Le Caravage, Valentin privilégiait pour modèles des marginaux.
Valentin de Boulogne. Concert au bas-relief.
Département des Peintures, musée du Louvre © RMN-GP - musée du Louvre - Adrien Didierjean
Mendiants, prostituées, bohémiennes ou soldats à la retraite, tous incarnaient dans les tableaux du maître leur propre rôle ou, plus osé pour l’époque, de grands personnages issus de la mythologie et de la religion. Cette volonté artistique de mêler le profane au sacré constitue sans doute la grande idée novatrice de génie qui propulsa cette peinture si singulière et expressive, habitée par d’étranges vibrations. Egalement, l’on devine devant toutes les toiles du Louvre la disposition du peintre pour une certaine provocation, qui finalement le range davantage près du Caravage que d’un Georges de La Tour. Mélangeant en une curieuse théâtralité épique décor, simplicité des personnages et situation paroxystique, Valentin nous propose le fascinant spectacle d’une comédie humaine à la précision tranchante et au climat irrationnel. A voir !
Expo Valentin de Boulogne - Réinventer Caravage
Musée du Louvre (hall Napoléon)
Paris 1er
horaires : de 9 h à 18 h, sauf le mardi
jusqu’au 22 mai 2017
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