Le couple de collectionneurs d’art y avait rassemblé une collection unique, à la croisée de l’art brut, de l’art naïf et de l’art populaire, également ouvert sur les cultures extra occidentales. Copieuse et bigarrée, l’expo La Fabuloserie réunit des œuvres et témoignages photographiques d’une cinquantaine de créateurs, aux côtés de la truculente tribu des Turbulents d’Alain Bourbonnais. Ces créations que l'on peut découvrir à la Halle Saint-Pierre sont d'autant plus troublantes qu'elles émanent d'artistes autodidactes et amateurs, complètement à l'écart des circuits normalisés de l'art officiel et des galeries.
François Monchâtre (© DR)
Elles étaient souvent l'oeuvre de gens de la campagne, qui avaient l'habitude de récupérer et de bricoler dans leur coin sans songer au regard des autres. Il y a par exemple Emile Ratier, ce paysan du Lot devenu aveugle, qui fabriquait des maquettes en bois ou encore Paul Amar, coiffeur à la retraite, qui mit... 4.000 heures pour reconstituer des fonds marins. Giovanni Batista Podesta (1895-1976), lui, est à l'origine d'une forte oeuvre symbolique dans laquelle motifs populaires et religieux se croisent.
Giovanni Batista PODESTÀ
(Treizième enfant d'une famille paysanne lombarde, il quitta l'école à l'âge de 10 ans et se fit embaucher comme aide maçon afin de subvenir aux besoins de sa famille.) Il est l’auteur de sculptures et de hauts et bas-reliefs multicolores et scintillants, réalisés notamment à partir de débris de miroirs et de papiers métallisés récupérés. L'on signalera entre autres Francis Marshall (né en 1946), dont les créations, non sans poésie et humour, déclinent des personnages à la fois grotesques et attachants comme l'on peut les découvrir dans l'œuvre La soupe, qui plonge le visiteur dans un univers familial et frustre.
Parfois une enfance malheureuse sert de fil conducteur pour comprendre une oeuvre. Ce fut par exemple le cas de Simone Le Carré-Galimard (1912-1996), créatrice de figurines fantaisistes et d'une série de poupées, jouet dont elle fut privée durant son enfance. Pour les réaliser, elle collectait toutes sortes de matériaux : boutons, perles, morceaux de poupées, capsules écrasées...
Des étranges architectures de coquillages de Paul Amar aux constructions rustiques aux mécanismes subtils de Pascal Verbena, en passant par les poteaux de bois aux expressions humaines de To Bich Hai, l'expo La Fabuloserie nous convie à un voyage à la fois décisif et mystérieux, celui de cet art « hors-les-normes », tel que le concevaient, en avance sur leur temps, des personnalités de premier plan comme Alain Bourdonnais et Jean Dubuffet.
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