Dans Capri-Revolution Mario Martone évoque le choc des cultures à la veille de la Première Guerre Mondiale sur fond de drame sensuel, métaphysique et poétique.
Le cinéma de Mario Martone [Frères d’Italie (2010), Leopardi : Il Giovane Favoloso (2014)] semble avant tout s’intéresser aux gens ainsi qu’à leur stratégie d’adaptation face à l’adversité. Ses longs métrages nous montrent souvent des personnages (artistes, scientifiques, intellectuels…) confrontés à un monde qui défie leurs idéaux. Dans Capri Revolution l’on retrouve ce fil conducteur à travers son héroïne Lucia, une bergère de 20 ans, écartelée entre le quotidien rude d’un monde rural en décomposition et la découverte initiatique d’une communauté hippie aux idéaux artistiques.
Capri-Revolution
Le réalisateur italien signe là un film onirique, peuplé de symboles et baignant dans un érotisme diffus. En outre, la beauté formelle du film se dévoile à travers une image puissante et panoramique de paysages, plongeant dans la lumière bleutée du Golfe de Naples et la singularité rustique de villages escarpés. Avec nuance Capri-Revolution décrit ce violent choc culturel entre cette communauté d’hippies et les conventions sociales d’une famille d’un vieux bourg de l’île de Capri. Martone s’est inspiré en partie de faits réels. Au début du XXe siècle, un vieux peintre utopiste (Karl Diefenbach) avait créé une communauté hippie au nom des « fils de fleurs ».
Capri-Revolution
Capri-Revolution
Quant à Seybu, le chef de la communauté hippie, il recherche en permanence l’essence de la nature et professe une foi absolue en l’art comme liberté. Au-delà du choc des cultures, l’on pourrait également percevoir Capri-Revolution comme un film sur l’adolescence avec ses thématiques comme l’éveil du désir, la rébellion face à la famille, le déplaisir face à la tradition. En une habile progression et sans voyeurisme le film s’attache à décrire les divers états émotionnels de la jeune chevrière, passant du stade de la simple curiosité à la fusion avec le groupe et son mode de vie : nudisme, amour libre, activités artistiques.
Capri-Revolution
La musique et la danse prennent beaucoup d’importance dans ce film sensoriel, plus suggestif que narratif. [Pour la musique, Martone a fait appel au Berlinois Sascha Ring dit Apparat, une star de la musique électro qui avait déjà composé la bande originale de Leopardi : Il Giovane Favoloso. Apparat fusionne classique, techno, musique orientale et musique électronique des années soixante.] De grande qualité ce film à la forme expressionniste n’est pas sans rappeler le cinéma de Barbet Schroeder - notamment More (1969) et Amnesia (2015) -, friand comme Martone de grandes fresques intimistes baignées de soleil, de nostalgie et de messages subliminaux.
durée : 2 h
Capri Revolution, un film de Mario Martone, drame, VF/VOST, Italie, 2018
Avec Marianna Fontana, Reinout Scholten Van Aschat, Antonio Folletto, Gianluca Di Gennaro, Eduardo Scarpetta, Jenna Thiam, Ludovico Girardello, Lola Klamroth, Maximilian Dirr et Donatella Finocchiaro
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