L’histoire d’Ava se profile plutôt flottante - celle d’une jeune fille de 13 ans apprenant au cours de ses vacances qu’elle va perdre rapidement la vue - et s’inscrit dans un film d’été plein de couleurs, célébrant à la fois la beauté des éléments naturels (vent, sable, eau) et la noce désireuse des corps adolescents. Imprégnée d’un réalisme aigu, la première partie du film nous laisse entrevoir le désarroi du personnage principal féminin (Ava) à travers un conflit larvé entre cette adolescente et son entourage familial.
A la fois peu loquace et manquant d’assurance, nous la voyons - par écran interposé - promener ses yeux sombres et sa mine boudeuse sur le monde. Coincée entre une jeune sœur capricieuse, qu’elle rechigne à garder pendant les vacances, et une mère soixante-huitarde (Maud), qui sans complexes affiche devant elle son corps déjà mûr et ses petits amis, Ava nous apparaît comme l'ado/oiseau blessé par excellence, à la fois possédé par le vague désir charnel, des récriminations restées secrètes et l’impérieuse demande de nouveauté que réclame son âge. La rencontre inopinée d’un jeune gitan, escorté d’un chien noir, provoque chez elle ce bouleversement. Et la seconde partie du long métrage prendra une coloration beaucoup plus métaphysique. En effet, la réalisatrice explore l’étrange relation amoureuse qui unit Ava et le jeune homme (Juan), qui l’entraîne dans une fuite dangereuse. Cela donne à l’ensemble un petit parfum du Pierrot le Fou (1965) de Jean-Luc Godard.
D’autant plus que le côté improvisé de cette escapade est lié à l’urgence et au temps. Ce dernier est d’ailleurs évoqué par la narratrice (Ava), appréhendant constamment la maudite épée de Damoclès pesant sur sa cécité prochaine. L’idée de liberté et d’enfermement se révèle fort vivace dans ce film par ailleurs peuplé de symboles étranges et d’images léchées, ce qui donne à l’ensemble un côté éminemment pictural et littéraire mais aussi sombre et politique [les inquiétant policiers à cheval de la plage à la recherche de Juan]. Troublante dans sa belle nudité sculpturale et sans complexes, Noée Abita - qui rappelle un peu par son apparence et son jeu l’actrice Adèle Exarchopoulos - habite pleinement ce personnage d’adolescente indécise, écartelée entre naïveté enfantine et goût pour les jeux dangereux.
Ava
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire