lundi 22 septembre 2025

Expo Jean-Baptiste Greuze - L'enfance en lumière


A l'occasion du 300e anniversaire de sa naissance le Petit Palais rend hommage à Jean-Baptiste Greuze (1725-1805), aujourd'hui méconnu mais en son temps acclamé par le public. C'est l'occasion de redécouvrir  un artiste majeur du XVIIIe siècle ! La publication de l’Emile ou De l’éducation de Rousseau en 1762 a marqué un tournant dans le regard que l'on portait jusque-là sur l’enfant.  Dans sa peinture Greuze a d'une certaine façon été un ambassadeur des préoccupations des philosophes des Lumières en mettant au premier plan l'enfant et son environnement familial.

Jean-Baptiste Greuze, Le Gâteau des rois, 1774.
Huile sur toile, 73 × 92 cm.
Montpellier, musée Fabre.
© Musée Fabre de Montpellier Méditerranée Métropole / Photo Frédéric Jaulmes

La place stratégique de l'enfant dans l'histoire de la peinture du XVIIIe siècle et notamment dans celle de Greuze s'inscrit durablement dans une complète révolution des mentalités. L'expo du Petit Palais nous permet de redécouvrir Greuze à travers le prisme du thème de l'enfance, proposant au visiteur de traverser une succession de petits salons dans lesquels trônent des oeuvres phares de ce contemporain de Chardin et de Fragonard. 

Jean-Baptiste Greuze, La Cruche cassée, 1771-1772.
 Huile sur toile, 109 × 87 cm.Paris, musée du Louvre.
© GrandPalaisRmn (musée du Louvre) / Photo Angèle Dequier

Aujourd'hui, l'on pourrait trouver un excès de sentimentalisme, voire de la mièvrerie à ces toiles, par exemple dans ces scènes où l'on voit de jeunes enfants au teint blanc et rosé étreindre  un oiseau ou un petit chien.  Dans le tableau intitulé Une Enfant qui joue avec un chien  l'artiste a mis en scène sa propre fille cadette (Louise-Gabrielle), âgée de trois ans. Elle est représentée en chemise et bonnet de nuit. Il faut sans doute replacer l'oeuvre de ce grand peintre qu'est Greuze dans une époque marquée par une certaine moralisation des moeurs. 

Jean-Baptiste Greuze, Une Enfant qui joue avec un chien (portrait de Louise-Gabrielle Greuze), 1767. Huile sur toile, 62,9 × 52,7 cm. Angleterre, Collection particulière.
© Collection particulière.

Les scènes de genre et de marivaudages popularisées par  Boucher correspondaient de moins en moins aux impératifs esthétiques  des classes dirigeantes et des Salons. En revanche, la représentation de la famille par des figures simples censées incarner l'honnêteté ou la fidélité collait aux valeurs de l'époque.  Exposée au Petit Palais sa première œuvre, Un père de famille expliquant la Bible à ses enfants, (présentée au Salon de 1753) est un exemple caractéristique de ces grands changements à la fois idéologiques et esthétiques.

Jean-Baptiste Greuze, Un écolier qui étudie sa leçon, dit Le Petit écolier, vers 1755-1757.
Huile sur toile, 62,5 × 49 cm.
Édimbourg, National Galleries of Scotland.
Photo : John McKenzie

Mais réduire l'expression picturale de Greuze à une simple reproduction (à travers ses portraits) de la candeur ou de la pureté supposée de l'enfance ou  à des valeurs bourgeoises à la mode (à travers ses scènes de genre) serait sans doute injuste et limitatif. Dans le parcours de l'expo l'on peut lire qu'il fut « un esprit frondeur » qui ne cessa « de réaffirmer sa liberté de création et la possibilité de repenser la peinture en dehors des conventions ». Par leur force suggestive de nombreux tableaux nous interpellent  comme L’Oiseleur accordant sa guitare (1757) ou Le Petit écolier, (vers 1755-1757), oeuvres  parcourues d'un frisson de modernité.

Jean-Baptiste Greuze, L’Oiseleur accordant sa guitare, 1757.
 Huile sur toile, 62 × 48 cm.
Varsovie, National Museum
© Varsovie National Museum / photo Krzysztof Wilczyński.

Avec son parfum de scène flamande [le positionnement des mains sur l'instrument fait aussi songer au tableau Le Concert de Mathieu Le Nain (1607-1677)] le premier intrigue par de multiples interprétations. Quant au second,  il dégage du mystère et une certaine épaisseur psychologique, qui annonce - de façon lointaine mais perceptible - les Manet, Vallotton, Modigliani et autres Balthus   à venir. Ironie de l'histoire (de l'art)  :  cet artiste comblé par les honneurs mourut dans son atelier le 21 mars 1805, délaissé  et ruiné financièrement ! Se penchant sur l'essence même de la peinture de Greuze un historien d'art a écrit : 
« La peinture de Greuze a cherché à illustrer la vertu, telle que la concevaient les philosophes des Lumières. Il ne s’agit nullement du moralisme militant et rigide de David, mais plutôt d’un rousseauisme pictural ».

Expo Jean-Baptiste Greuze - L'enfance en lumière
Petit PalaisMusée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Avenue Winston-Churchill
Paris 8e
horaires : du mardi au dimanche de 10 h à 18 h
Nocturnes les vendredis et samedis jusqu'à 20 h
Fermé le 25 décembre et le 1er janvier

jusqu'au 25 janvier 2026

Jean-Baptiste Greuze, Autoportrait, vers 1760.
Huile sur bois, 65 × 51,5 cm.
Paris, musée du Louvre.
© GrandPalaisRmn (musée du Louvre) / Photo Thierry Le Mage




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